Aujourd'hui après un sublime échange suivi d'une discussion incroyable dans un groupe WhatsApp secret, j'ai décidé de me dire autiste.
Assumer
Et je me suis ensuite rappelé ce que j'avais dit de l'importance de s'assumer pour sortir de la honte.
Alors ni une ni deux, j'ai envoyé le même exact message à pas mal des gens que j'apprécie le plus
Bonne nouvelle, je viens de comprendre que j'étais autiste en plus d'être ADHD. A mon avis les crises de dépression étaient plu le symptôme que le fonds du problème. J'ai l'espoir raisonnable de moins en avoir maintenant.
Alors sur la forme, on voit que j'ai fait bon usage de ce livre dont je suis fan, petit traité de manipulation à l'usage des honnêtes gens
On reconnait aisément ici la fameuse technique du sandwich pour faire passer la pillule : une tranche de pain, la merde au milieu, une tranche de pain.
La merde de leur point de vue c'est cette idée horrible que je serais ADHD et autiste.
Le pain initial c'est de commencer la phrase par Bonne nouvelle ! qui fait subtilement croire que ce que suit va être forcément une bonne nouvelle alors que pour eux c'est une merde.
Le plus drôle, c'est que c'est effectivement une bonne nouvelle dans l'absolu. Je me sens très très heureux en ce moment. Il n'y a absolument aucune honte à être neuro-atypique. Et c'est un bonheur d'assumer. Le vrai drame c'est d'être neuroatypique et de ne pas le savoir. Sauf que c'est une bonne nouvelle pour moi, mais pas encore pour eux dans l'état actuel de leur compréhension, ils ont besoin d'espoir.
Et l'espoir du coup, et il est réel et pour le coup partagé : c'est que je fasse moins d'épisodes dépressifs, maintenant que j'aurais moins de raison de le faire. Maintenant que j'ai compris que j'avais le droit d'être qui j'étais, parce que dans l'ensemble je suis plutôt un mec sympa et stylé.
La manoeuvre a très bien marché dans l'ensemble. Par contre il y a eu un réflexe compréhensif mais très relou.
Non mais t'es absolument sûr sûr sûr que t'es autiste ? Faut surtout pas s'auto-diagnostiquer. Seul un médecin a le droit de mettre l'étiquette fatidique
Intuitivement ca sonne juste non ?
Oui ça sonne juste, mais l'intuition ce n'est pas la vérité, ce n'est rien d'autre que de l'expérience accumulée.
Par exemple moi quand je prends la voiture pour conduire, mon intuition me dit prendre la portière de droite pour conduire. C'est cool quand je conduis en France, je n'ai meme pas besoin d'y penser.
Par contre quand je suis en Angleterre, mon intuition me dit de la merde.
Maintenant imaginez que vous viviez dans une société qui traite la santé mentale comme les sidaiques en 1990. C'est dans cette société que votre intuition aura été entrainée, et elle vous dira de la merde.
Vous n'y etes pous rien, c'est pas votre faute.
Par contre si vous ne faites jamais confiance à ceux qui eux ont une expérience de vie intense et encyclopédique de ces questions, là oui, c'est entièrement de votre faute.
En fait cela porte un nom cette attitude : c'est le parallèle exact du mansplaining en santé mentale.
Appelons cela du mindsplaining, ça ne va pas plaire aux personnes littérales, mais c'est très poétique.
Mindsplaining : why the fuck do you think you know better than me what’s in my mind ?
Le mindsplaining, c'est très désagréable et vous en faites beaucoup trop souvent
Si une meuf me dit qu'elle est a eu de longues discussions avec ses copines et qu'ensuite elle a fait des recherches intenses sur internet, et que cela lui a permis de comprendre qu'elle avait de l'endométriose, je ne vais pas lui dire que seul le généraliste a le droit de faire un diagnostic, et je ne lui demande pas si elle est absolument sure que c'est pas plutôt un truc qui n'a rien à voir avec la choucroute ?
Parce que je ne sais que je ne sais quasiment rien sur l'endométriose.
En vrai je ne sais que deux choses sur l'endométriose :
ca fait super mal
si les hommes étaient touchés eux aussi, on aurait trouvé une solution depuis longtemps.
Le mindsplaining est insupportable. Accepter de le subir signifie devoir douter, sur un sujet dont nous sommes experts, de tout ce que nous disons, pensons, savons, et de nous mettre pendant la conversation sous supervision médicale symbolique.
Alors là je suis désolé, mais si vous me faites du mindsplaining, je vous dirais d'aller vous faire foutre
Pour comprendre qui je suis, j'ai un premier super pouvoir que n'a aucun médecin, ni aucune autre personne au monde : je suis télépathe, je suis capable de lire dans mes propres pensées. J'ai un second super pouvoir, c'est que je réfléchis à tout cela depuis une quinzaines d'années. Alors qu'un médecin ne me voit que pas longtemps tous les rarement, et que ses connaissances sont certes grandes mais dispersées dans énormément de sujets là où moi je suis mono-maniaque. J'ai une troisième super pouvoir, c'est que j'ai trouvé ma tribu et j'ai accès à d'autres personnes devenus spécialistes de ces sujets.
Un médecin est une ressource utile à laquelle je fais appel quand j'en ai besoin, ce n'est en revanche en aucun cas un adulte sous la supervision duquel je serais condamné à vivre toute ma vie.
Au cas où mon ton vous pique, faites une petite pause et réfléchissez.
Quel est à votre avis l'effet que produit sur notre santé mentale votre mise sous curatelle médicale non nécessaire et non sollicitée ?
C'est simple, elle nous amènerait, si on faisait l'erreur de ne pas la rejeter de la manière la plus claire qu'il soit, de devoir douter de nous en permanence. À saboter notre estime de soi. À ne pas respecter notre intelligence. A douter que nous sommes qui nous sommes.
En fait c'est tout simplement du gaslighting.
Et on sait les dégats que cela cause le gaslighting.
Alors non, je sais qui je suis et je n'ai besoin du tampon d'aucun médecin
Et je suis très heureux d’etre moi, on n’est jamais trop soi meme.
Est-ce que je suis sur à 100% que je suis autiste ? Non
Est-ce que c'est grave ? Non.
Dire "Je suis autiste" n'a pas de portée performative.
Une parole performative c'est quand notre bon roi Emmanuel décide tout seul, un soir d'élections en Europe, de dire : "Je dissous l'Assemblée Nationale française"
Le simple fait de prononcer ces mots accomplit l'effet annoncé, en plus de foutre la merde, c'est ce que l'on appelle une portée performative.
Je pense qu’il y a une forme d’anxiété qu'il en soit de même pour l'utilisation d'un mot comme "autisme".
Si je dis "je suis autiste", ou même si je commence un auto-diagnostic, PAF je serais une personne différente et pire de qui j'étais hier, et ce de manière irréversible.
Il n'en est rien.
Voici ce qu'il se passe si vous dites "je suis autiste" et que vous vous etes plantés
Vous allez rencontrer des gens dont vous pensez être proches, mais en fait non
Vous allez piocher dans les ressources de la communauté et vous essayez les stratégies, mais ca ne donne pas d'effets flagrants.
Vous vous lassez un peu.
Vous comprenez que vous vous etes plantés.
Vous arrêtez de dire "je suis autiste"
Et il ne s'est absolument rien passé de grave
Voyez ? C'est simple en fait, et maintenant que vous l'avez déjà un peu entrainée, votre intuition commence déjà à vous jouer moins de tours qu'avant.
Magnifique, parfait, limpide 💜